Diagnostic en imagerie de la néovascularisation de type 3

La néovascularisation de type 3, anciennement dénommée anastomose chorioré́tinienne ou encore prolifération angiomateuse rétinienne, est une forme clinique particulière de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) néovasculaire. Sa particularité est d’affecter spécifiquement la rétine neurosensorielle, avec pour conséquence une réponse néovasculaire télangiectasique, avec une prolifération intrarétinienne. Classiquement, dans les autres formes de néovascularisation maculaire secondaire à la DMLA, la prolifération néovasculaire est d’origine choroïdienne. Dans la néovascularisation de type 3, l’origine des néovaisseaux a longtemps fait l’objet d’une controverse. Dans cet article, après un bref résumé de cette controverse, nous détaillerons les éléments sémiologiques du diagnostic avec une attention particulière pour les signes en OCT et OCT-A.

Controverse sur l’origine de la lésion

La première description de la lésion date de 1992. Hartnett rapporte l’existence d’une lésion angiomateuse rétinienne associée à des drusen et responsable de décollements de l’épithélium pigmentaire (DEP). Plusieurs dénominations ont été utilisées pour décrire cette lésion, telles qu’anastomose choriorétinienne (ACR) ou retinal angiomatous proliferation (RAP) – prolifération angiomateuse rétinienne (PAR). Plus récemment, dans la classification proposée par Freund, elles correspondent aux néovaisseaux de type 3.
En 2001, Yannuzzi avance que la RAP est une prolifération angiomateuse d’origine rétinienne qui s’étend vers l’espace sous-rétinien. Son origine serait le plexus capillaire profond rétinien. Une des causes proposées pour cette prolifération serait une éventuelle communication avec une néovascularisation choroïdienne existante ou préexistante.
Pour Gass, l’ACR correspond à un envahissement intrarétinien d’un néovaisseau de type 1 (ou sous-épithélial) préexistant. C’est Freund qui, plus tard, introduit le terme de néovascularisation de type 3 dans la lignée physiopathologique de la classification de Gass. D’après Freund, il peut s’agir d’une prolifération néovasculaire focale ayant pour origine le plexus capillaire profond. Un envahissement néovasculaire intrarétinien à partir d’une membrane néovasculaire choroïdienne de type 1 (néovaisseau choroïdien occulte) est possible. Enfin, l’origine peut être une extension néovasculaire rétinienne à partir d’une rupture de la membrane de Bruch. 

Comment faire le diagnostic ?

Comme les autres lésions de la DMLA, la néovascularisation de type 3 peut se manifester par une baisse visuelle ou par un syndrome maculaire (métamorphopsies, scotome central). Il peut arriver que la lésion soit asymptomatique en cas de découverte récente et fortuite ou souvent lors de la surveillance du second œil. L’évolution des symptômes peut être assez rapide, comparée aux néovaisseaux de type 1 par exemple.
Au fond d’œil, la néovascularisation de type 3 se manifeste souvent par une hémorragie punctiforme, de petite taille, proche d’un vaisseau, souvent à proximité de l’aire fovéale. 

Les examens complémentaires vont permettre de caractériser ces lésions, dont les éléments sémiologiques sont assez typiques. Les 3 examens clés sont l’angiographie à la fluorescéine (FA), l’angiographie au vert d’indocyanine (ICGA) et la tomographie en cohérence optique en spectral domain (SD-OCT). Ces 3 examens permettent de poser le diagnostic, et l’OCT est l’examen clé du suivi :
- en angiographie à la fluorescéine, la néovascularisation de type 3 est caractérisée par une image vasculaire hyperfluorescente de petite taille, fréquemment située au bord de la zone avasculaire centrale fovéale, avec une diffusion du colorant aux temps tardifs de l’angiogramme (figure 1) ;
- en ICGA (figure 2), les lésions de type 3 sont hypercyanescentes dès les temps précoces, mais c’est au temps tardif que la lésion est typique, avec le classique hot spot, ou point hypercyanescent isolé ;
- l’OCT joue un rôle majeur dans le diagnostic et le suivi des lésions (figure 3). Habituellement, l’épaisseur choroïdienne est amincie.

Figure 1. Aspect en angiographie à la fluorescéine d’une néovascularisation de type 3 au temps précoce (à gauche) et au temps tardif (à droite). On note la présence d’une hyperfluorescence précoce punctiforme au voisinage d’un vaisseau rétinien avec diffusion au temps tardif.

Les différents stades évolutifs de la néovascularisation de type 3 ont été récemment détaillés par Su et al. (figure 3) :
- au stade 1, on retrouve une lésion arrondie focale hyperréflective intrarétinienne (ou hyperréflective foci) associée à des logettes œdémateuses maculaires cystoïdes, sans interruption des couches de la rétine externe ;
- au stade 2, on note une évolution vers l’interruption de la rétine externe, avec ou sans interruption de l’épithélium pigmentaire ;
- enfin au stade 3, il existe une progression postérieure de la lésion de type 3, aboutissant à une prolifération à travers l’épithélium pigmentaire et entraînant un décollement séreux de l’épithélium pigmentaire.
Après traitement par anti-VEGF, les signes exsudatifs régressent et l’épaisseur rétinienne diminue. On constate également souvent une diminution de la taille de la lésion hyperréflective.

Cas particulier des nascent de type 3 (type 3 naissant)

La forme très précoce de la néovascularisation de type 3 a été décrite récemment par Sacconi et al. Il s’agit de foci hyperréflectifs intrarétiniens situés au-dessus d’un DEP drusénoïde, sans signes exsudatifs. Ces formes sont souvent confondues avec une simple migration pigmentaire dans le cadre d’une maculopathie liée à l’âge. Cette entité a été dénommée « néovascularisation de type 3 naissante » (nascent type 3 neovascularization). Elle ne constitue pas une indication thérapeutique aux anti-VEGF mais nécessite une surveillance étroite mensuelle car elle peut rapidement évoluer du stade préclinique – focus hyperréflectif sans exsudation – vers le stade clinique – progression de la lésion du plexus capillaire profond vers l’épithélium pigmentaire et l’espace sous-épithélium pigmentaire, accompagné d’une exsudation. 

Apport de l’OCT-A

L’OCT-A permet une analyse précise de la microcirculation rétinienne et choroïdienne sans injection de produit de contraste. Son principe repose sur la réalisation de 2 OCT successives très rapprochées dans le temps. Une analyse fondée sur des algorithmes permet de mettre en évidence les structures en mouvement dans la zone étudiée, qui correspondent aux éléments figurés du sang. Une reconstruction en 3 dimensions est réalisée, offrant une visualisation précise et fidèle de la circulation choriorétinienne normale et pathologique.

En OCT-A, la néovascularisation de type 3 est définie par une anastomose rétinorétinienne. L’origine de la lésion est située au niveau du plexus capillaire profond. Des vaisseaux haut débit s’infiltrent vers la rétine externe pour former un complexe vasculaire à flux élevé, en forme de mèches (tufts) (figure 4). Cette lésion peut parfois s’étendre vers l’espace sous-épithélial et/ou la choriocapillaire, avec la visualisation d’une petite lésion en forme de glomérule (clew-like lesion).
Une segmentation correcte du plexus capillaire profond, de la rétine externe et de la choriocapillaire, sur une aire d’acquisition suffisante, fournit ainsi des informations pertinentes sur la physiopathologie et l’évolution de ces lésions.

L’OCT-A apporte un argument supplémentaire qui appuie l’origine vasculaire intrarétinienne de la néovascularisation de type 3 dans la majorité des cas au niveau du plexus capillaire profond. Dans les nascent de type 3, l’OCT-A a permis de prouver que ces foci présentaient un flux précoce, précédant l’apparition de la lésion néovasculaire exsudative de type 3.
Le suivi en OCT-A est utile à la fois en visualisation « en face » (ou C-scan) et en B-scan.

Évolution

Au cours du suivi et du traitement de ces lésions, 2 profils évolutifs distincts se démarquent. Certains patients évoluent vers l’atrophie, avec des remaniements au niveau de la rétine externe et une disparition de la lésion. D’autres voient la lésion progresser vers l’espace sous l’épithélium pigmentaire, avec apparition de la lésion glomérulaire dans la couche choriocapillaire.

Conclusion

Le diagnostic et la surveillance de la néovascularisation de type 3 reposent sur une imagerie multimodale (FA, ICGA, SD-OCT, OCT-A). L’OCT-A a permis de confirmer l’origine de cette lésion néovasculaire, tranchant ainsi après des années de controverses. Cette forme articulière de néovascularisation se distingue des néovaisseaux de types 1 et 2 par son origine intrarétinienne, au niveau du plexus capillaire profond.

Pour en savoir plus
Freund KB, Ho IV, Barbazetto IA et al. Type 3 neovascularization: the expanded spectrum of retinal angiomatous proliferation. Retina. 2008;28(2):201-11.
Jackson TL, Danis RP, Goldbaum M et al. Retinal vascular abnormalities in neovascular age-related macular degeneration. Retina. 2014;34(3):568-75.
Su D, Lin S, Phasukkijwatana N et al. An updated staging system of type 3 neovascularization using spectral domain optical coherence tomography. Retina. 2016;36 Suppl 1:S40-9.
Miere A, Querques G, Semoun O et al. Optical coherence tomography angiography in early type 3 neovascu-larization. Retina. 2015; 35(11):2236-41.
Sacconi R, Sarraf D, Garrity S et al. Nascent type 3 neovascularization in age-related macular degeneration. Ophthalmol Retina. 2018; 2(11):1097-106.
Miere A, Querques G, Semoun O et al. Optical coherence tomography angiography changes in early type 3 neovascularization after anti-vascular endothelial growth factor treatment. Retina. 2017;37(10): 1873-9.

Auteurs

  • Oudy Semoun

    Ophtalmologiste

    Centre hospitalier intercommunal, Créteil ; Institut d'ophtalmologie du Panthéon, Paris

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