Gestion de l’œdème maculaire secondaire à une occlusion de branche veineuse rétinienne chez un patient en activité professionnelle
Nous rapportons le cas d’un patient en activité professionnelle traité pour une occlusion de branche veineuse rétinienne à destinée maculaire. La récidive œdémateuse précoce pose le challenge de la gestion de l’observance et fait choisir une molécule à long délai d’action.
Observation
Printemps 2021, un patient de 58 ans consulte en urgence pour baisse d’acuité visuelle (BAV) de près sur son œil droit (OD).
Une occlusion de branche veineuse (OBVR) explique cet œdème maculaire (OM) sectoriel supérieur (figures 1 et 2), l’AV est mesurée à 8/10 P5 OD et 10/10 P2 OG. À l’interrogatoire, aucun facteur de risque cardiovasculaire connu. La réfraction trouve une petite myopie bilatérale -1,75 ODG et une addition de +2. Le bilan des facteurs de risque d’athérosclérose ne détecte pas de paramètre modifiable.
Trois injections intravitréennes (IVT) d’anti-VEGF à 4 semaines d’intervalle lui sont prodiguées. Au décours des 6 semaines après la troisième injection, son AV est évaluée à 8/10 P5. L’OCT met en évidence un épaississement maculaire associé à un décollement séreux rétinien (DSR) sous-fovéolaire (figure 3). La pression intraoculaire (PIO) approche les 16 mmHg pour une pachymétrie à 565 µm, les papilles optiques sont symétriquement physiologiques.
Lorsqu’on propose au patient de nouvelles IVT d’anti-VEGF, sa réticence se traduit par la réclamation d’une solution plus durable car il habite à 30 km de la clinique où sont réalisées les injections. Il adhère toutefois à l’alternative de l’implant de dexaméthasone (DXM) qui jugule totalement l’OM dès le premier mois (figure 4). Une bithérapie timolol + dorzolamide est mise en place pour maîtriser l’hypertonie oculaire cortico-induite (OD 26 mmHg, OG 18 mmHg) [1]. L’angiographie en fluorescéine dévoile un territoire d’hypoperfusion périphérique dans le secteur de l’OBVR (figure 5), qui sera couvert par une photocoagulation ciblée jusqu’à l’ora (figure 6). Au deuxième mois, l’AV OD étant remontée à 10/10 P2 et la PIO étant à 16 mmHg sous bithérapie, la réalisation de l’OCT est inutile. Hélas, 4 mois après l’IVT de DXM, le patient décrit une BAV. Une récidive de l’OM est marquée par un DSR lorsqu’on analyse l’OCT (figure 7). L’AV est à 6/10 P2. Un nouvel implant de DXM sous couverture topique hypotonisante sera prescrit.
Discussion
Dans le cadre des pathologies maculaires, l’objectif premier est d’obtenir et de maintenir la meilleure AV. Le deuxième objectif est de réduire le fardeau thérapeutique pour le patient, le système de santé et le médecin en obtenant l’intervalle de réinjection nécessaire le plus long. Ce deuxième point garantit, entre autres, le maintien d’une bonne observance et un succès thérapeutique au long cours [2].
Selon une métanalyse compilant les données d’études randomisées et d’études de vraie vie, l’implant de DXM injecté tous les 6 mois est fonctionnellement moins efficace que les anti-VEGF. Cependant, lorsque l’implant de DXM est injecté tous les 4 mois, son efficacité devient comparable [3]. Dans une des études rétrospectives, les auteurs avaient proposé une surveillance mensuelle après l’injection de DXM, la récidive anatomique était le critère de retraitement. Le délai moyen de réinjection fut de 119 jours [4].
Les effets secondaires des corticoïdes ainsi que leur gestion sont détaillés lors de l’information au patient dès le début de la prise en charge. On sait que par rapport aux anti-VEGF, le risque relatif d’hypertonie oculaire cortico-induite est RR = 3,89 et celui de cataracte RR = 5,22 [3].
Le traitement de l’hypertonie cortico-induite est bien codifié [1].
L’effet cataractogène oriente vers le choix des anti-VEGF en première intention chez le jeune patient phake. Cependant, lorsque l’accommodation est déjà perdue, le passage vers une pseudophakie est moins préjudiciable. Gardons enfin à l’esprit que pour les patients phakes et forts amétropes, le passage à une pseudophakie avec emmétropisation unilatérale induite risque d’entraîner une anisométropie invalidante. Cela peut être mis en balance lors du choix de la molécule.
Conclusion
Le choix entre les différentes alternatives thérapeutiques dépend de facteurs oculaires (réfraction, statut phake, risque d’apparition d’une hypertension intraoculaire [HTO] cortico-induite), mais aussi de facteurs contextuels. Dans notre cas, la sévérité de l’OBVR nécessite un rythme mensuel d’IVT anti-VEGF que le patient refuse. Avec un implant de DXM tous les 4 mois, sa qualité de vie s’en trouve améliorée, son œil est exposé 4 fois moins souvent aux risques (infectieux notamment) liés au geste, notre Sécurité sociale est épargnée, le temps médical aussi. Il faudra toutefois surveiller régulièrement sa pression oculaire ainsi que sa couche de cellules ganglionnaires et de fibres optiques par un OCT.
Références bibliographiques
[1] Recommandations SFG/SFO : Conduite à tenir face au risque d’hypertonie oculaire après injection intra-vitréenne. https://wwwle glaucomefr/2017/recommandations-sfg-sfo-2017/. 2017.
[2] Ehlken C, Ziemssen F, Eter N et al. Systematic review: non-adherence and non-persistence in intravitreal treatment. Graefes Arch Clin Exp Ophthalmol. 2020;258(10):2077-90.
[3] Ming S, Xie K, Yang M et al. Comparison of intravitreal dexamethasone implant and anti-VEGF drugs in the treatment of retinal vein occlusion-induced oedema: a meta-analysis and systematic review. BMJ Open. 2020;10(6):e032128.
[4] Bakri SJ, Omar AF, Iezzi R, Kapoor KG. Evaluation of multiple dexamethasone intravitreal implants in patients with macular edema associated with retinal vein occlusion. Retina. 2016;36(3): 552-7.