Œdème maculaire diabétique : un nouveau regard sur l’assèchement et l’espacement ?
Symposium Roche

Le faricimab est le seul anticorps bispécifique disponible dans le traitement actuel de l’œdème maculaire diabétique (OMD), ciblant à la fois l’angiopoïétine 2 et le VEGF-A. 

Il est indiqué en première intention dans le traitement : 
• de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) exsudative rétrofovéolaire ;
• de la baisse de l’acuité visuelle (AV) due à l’OMD, en cas de forme diffuse ou de fuites proches du centre de la macula, chez les patients ayant une baisse d’AV inférieure ou égale à 5/10e et chez lesquels la prise en charge du diabète a été optimisée. 

Il a également obtenu en juillet 2024 l’autorisation de mise sur le marché européenne dans la baisse d’AV due à un œdème maculaire secondaire à une occlusion de branche veineuse rétinienne (OBVR) ou de la veine centrale de la rétine (OVCR) chez les patients adultes. Il se présente actuellement en France sous la forme d’un flacon à reconstituer, la seringue préremplie est en attente de remboursement.   

Sur le plan mondial, il est autorisé dans plus de 105 pays et on recense plus de 800 000 patients traités fin janvier 2025. Sept millions de doses ont été distribuées dans le monde en mars 2025. 

L’arsenal thérapeutique de l’OMD inclut également les autres molécules ciblant le VEGF-A ainsi que les corticostéroïdes à longue durée d’action. Certains facteurs sont à prendre en compte pour la décision thérapeutique, au-delà de l’épaisseur centrale maculaire (ECM), comme la présence d’exsudats durs (ED), la diffusion maculaire et la présence de liquide intra­rétinien (LIR). 

Biomarqueurs de la théorie à la pratique : quelles implications cliniques ? 

Exsudats durs
Il s’agit d’un biomarqueur important de la maladie dans l’OMD. Ce sont des agrégats lipoprotéïques déposés principalement dans la couche plexiforme externe. Lorsqu’ils se déposent dans la région fovéale, les ED peuvent entraîner une perte de ­vision irréversible. Ils représentent un biomarqueur potentiel de la gravité de la maladie et de la réponse au traitement : l’augmentation de la formation des ED est un témoin de progression de la rétinopathie diabétique, associé à un risque accru de déficience visuelle par la formation de plaques sous-­rétiniennes, de fibrose et d’atrophie. 

Les traitements anti-­VEGF et cortico­stéroïdes ont pour objectif de réduire les ED. La double inhibition Ang-2/VEGF-A a également démontré son potentiel ­anti-­inflammatoire chez les patients atteints d’un OMD dans les études de phase III YOSEMITE/RHINE[1], comparativement à l’aflibercept 2 mg. L’analyse des ED était fondée sur leur nombre sur la photographie couleur – 6 mm de la grille ETDRS – et sur leur nombre et volume en SD-OCT, à l’inclusion et aux semaines 16, 52 et 96. Le faricimab entraînait une réduction  significativement plus importante du nombre d’ED aux ­semaines 52 et 96 et, en analyse volumétrique, une diminution significative du nombre et du volume des ED dans les sous-champs de 1 et de 3 mm de diamètre, qui se maintient à 2 ans.

Diffusion maculaire 
La diffusion angiographique maculaire est un biomarqueur de stabilité vasculaire. En effet, plusieurs études ont montré que la réduction de la zone de fuite maculaire était corrélée à l’amélioration des résultats anatomiques et fonctionnels – augmentation de 0,7 lettre d’AV pour chaque diminution de 1 mm2 de la surface de fuite maculaire, étude RUBY. De même, l’augmentation de la surface de fuite maculaire était associée à un risque accru de développer un OMD impliquant une atteinte centrale – étude PANORAMA. L’effet du faricimab sur la diffusion maculaire a été évaluée dans l’étude YOSEMITE/RHINE, comparativement à l’alibercept 2 mg, au cours d’une phase d’induction comparable entre les 2 molécules, chez des patients naïfs de traitement ou déjà traités pour un OMD. Il existait une plus grande réduction de la zone de diffusion maculaire sur l’angiographie à la fluorescéine à la semaine 16 avec le faricimab par rapport à l’aflibercept 2 mg. Un plus grand nombre de patients traités par le faricimab avaient une résolution complète de la diffusion maculaire à la semaine 16. Cela pourrait être en partie expliqué par la réduction des fuites vasculaires induite par la neutralisation de l’angiopoïétine 2, démontrée sur des modèles murins. Un traitement précoce par la double inhibition anti-VEGF/anti-Ang-2 permettrait ainsi d’améliorer la stabilité vasculaire. 

Liquide intrarétinien 
La diminution précoce du LIR analysée sur l’OCT maculaire est un facteur prédictif de réponse anatomique et fonctionnelle à 1, 2 et 3 ans prouvé par de précédents auteurs. Les analyses post hoc en sous-groupes de l’étude YOSEMITE/RHINE ont permis d’étudier ces variations de façon plus précise grâce au calcul volumétrique en intelligence artificielle (IA) du LIR sur l’OCT maculaire – et non pas seulement en se fondant sur l’ECM, à baseline, à 3 mois et 2 ans de traitement. Trois groupes de patients ont ainsi été définis en fonction du taux réponse anatomique : très bons répondeurs – réduction du LIR supérieure à 50% –, moyens répondeurs – entre 50 et 20% – et les sous-­optimaux – inférieure à 20%. Il est intéressant de noter que les patients « sous-optimaux » ne sont pas ceux présentant le plus de LIR ni la plus grande ECM à baseline. À 2 ans, on note une diminution du LIR pour tous les patients mais elle est plus marquée chez les bons et les moyens répondeurs. De même, il existe une amélioration significative de l’AV à 2 ans – gain de plus de 15 lettres – également plus importante chez les bons et les moyens répondeurs, sans différence significative entre ces 2 sous-groupes. On peut donc considérer un cut off à 20% de réduction du LIR comme facteur de prédictibilité pour la réponse anatomique et fonctionnelle à 2 ans. Par ailleurs, il est à noter que le facteur temps est important chez les moyens répondeurs, car ils présentent une moins bonne réponse anatomique après les premières injections que les bons répondeurs ; toutefois, il n’existe pas de différence au niveau fonctionnel entre ces 2 sous-groupes à 2 ans.

Résultats en vraie vie 

Étude FARWIDE [2] 
Il s’agit d’une étude rétrospective de vraie vie analysant l’efficacité, la tolérance et la durabilité du faricimab à 1 an chez des patients traités pour un OMD au Royaume-Uni. Pour les yeux naïfs de traitement, la vision s’est améliorée en moyenne de 5 lettres en 12 mois et les injections moyennes ont diminué de plus de la moitié au cours des 6 derniers mois de traitement. Pour les yeux précédemment traités, la vision a été maintenue pendant 12 mois et le nombre d’injections a diminué au cours des 6 derniers mois de traitement ; cela suggère une augmentation de l’intervalle de traitement. On note un faible taux d’inflammation intraoculaire – 0,14% – et d’endophtalmie – 0,04% –, ne dépassant pas les taux observés dans les essais cliniques de phase III. 

Étude américaine FARETINA-DME [3]
C’est une étude rétrospective évaluant le faricimab sur l’OMD, en situation réelle à l’aide des données du registre IRIS, avec un suivi à 12 mois. La vision est améliorée dans les yeux naïfs de traitement et était stable dans les yeux précédemment traités – dont deux tiers avaient été traités préalablement par aflibercept 2 mg. Les yeux naïfs de traitement avec une AV de départ inférieure à 20/40 ont présenté une plus grande amélioration de la vision à la sixième injection – gain de 5 lignes. Il existe une réduction de l’épaisseur rétinienne centrale significative. On observe moins d’injections intravitréennes (IVT) au cours des 6 derniers mois de traitement par faricimab, ce qui suggère une extension rapide des intervalles. Un faible taux d’IOI – 0,07% – et d’endophtalmie – 0,07% – a été recensé et ne dépasse pas les taux observés dans les essais cliniques. 

Étude Rush RB et Rush SW [4]
Elle rapporte les résultats à court terme du switch vers le ­faricimab chez des patients avec un OMD résistant à l’aflibercep 2 mg, après la loading dose à 4 mois. Ces patients présentaient un OMD traité depuis plus d’un an, avec plus de 4 IVT au cours des 6 derniers mois et un intervalle de traitement inférieur ou égal à Q8. Les résultats anatomiques montrent un assèchement complet significativement plus marqué chez les patients traités par faricimab – 37% – vs l’aflibercept 2 mg – 4%. De même, il existe une diminution significative de l’ECM dans le groupe faricimab – 400,2 µm à 340 µm, p < 0,001 – non retrouvée dans le groupe aflibercept. D’un point de vue fonctionnel, l’amélioration de l’AV – gain plus de 2 lignes – concernait 41,7% des patients sous faricimab vs 11% des patients sous aflibercept 2 mg. Plus récemment, ces auteurs ont publié des résultats similaires à 1 an. 

Ces études doivent être interprétées avec prudence car elles sont propres au contexte du pays dans lequel elles ont été menées et ne sont pas nécessairement généralisables à d’autres. 
De plus, le recueil est limité aux données capturées en pratique courante, sans mesures standardisées de l’AV notamment, et aucune justification de la fréquence des injections n’était fournie par le médecin. Enfin, les données actuelles ne reflètent pas nécessairement les modèles de traitements futurs. 

Tolérance du farimab dans les essais cliniques et en vraie vie
Un taux d’IOI est estimé à environ 0,2% par injection en vraie vie, similaire à ceux rapportés dans les études de phase III. Les uvéites sont le plus souvent d’intensité légère à modérée, contrôlées par traitements topiques. Le taux d’endophtalmie et de vascularite est également très faible : 26 cas de vascularites rétiniennes ont été rapportés – 0,017/1 000 IVT –, dont 9 de vascularites occlusives – 0,006/1 000 IVT – sur 1,5 million de doses de faricimab. Un retour de l’AV initiale est signalé dans la majorité des cas. Le taux d’endophtalmie est estimé entre 0 et 0,11%. 

Conclusion 
Les données de vraie vie confortent les données des études pivotales sur le faricimab chez les patients atteints d’un OMD. Il existe une transposabilité des essais cliniques en vraie vie concernant l’AV, l’amélioration anatomique et la durabilité. Sous faricimab, la phase d’induction a été marquée par des améliorations anatomiques significatives des biomarqueurs tels que les ED, la LIR et la diffusion maculaire. La tolérance en vraie vie est comparable aux essais cliniques. 

Références bibliographiques 
[1] Wong TY, Haskova Z, Asik K et al. Faricimab treat-and-extend for diabetic macular edema: Two-year results from the randomized phase 3 YOSEMITE and RHINE trials. Ophthalmology. 2024;131(6):708-23
[2] Penha FM, Masud M, Khanani ZA et al. Review of real-world evidence of dual inhibition of VEGF-A and ANG-2 with faricimab in NAMD and DME. Int J Retina Vitreous. 2024;10(1):5.
[3] Borkar DS, Tabano DC, Ali FS et al. Early outcomes after initiation of faricimab in patients with diabetic macular edema. Ophthalmic Surg Lasers Imaging Retina. 2025 May 15:1-9. 
[4] Rush RB, Rush SW. Faricimab for treatment-resistant diabetic macular edema. Clin Ophthalmol. 2022;16:2797-801.

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