Apport des nouvelles technologies dans les explorations des occlusions de branche veineuse rétinienne 

L’occlusion veineuse rétinienne est le deuxième trouble vasculaire rétinien le plus courant après la rétinopathie diabétique et est considérée comme une cause importante de perte visuelle. Le diagnostic clinique de l’occlusion de branche veineuse rétinienne (OBVR) est aisé devant un tableau bruyant fait d’hémorragies rétiniennes striées en flammèches, de nodules cotonneux, dilatation et tortuosité veineuse et œdème rétinien, ­localisés au territoire rétinien normalement drainé par la veine occluse. Les explorations paracliniques ont tout leur intérêt pour orienter et accompagner la conduite thérapeutique.

Angiographie rétinienne

L’angiographie à la fluorescéine visualise directement les vaisseaux rétiniens de la macula jusqu’à la périphérie de la rétine et analyse la dynamique du remplissage des vaisseaux par la fluorescéine. De nouveaux angiographes à ultra grand champ rationalisent l’examen en permettant l’exploration de la périphérie rétinienne jusqu’à 102 ou 200° en un seul cliché.
L’ischémie rétinienne est détectée beaucoup plus souvent avec ces nouvelles explorations qu’avec les angiographes classiques. Une corrélation entre la surface de non-perfusion, l’acuité visuelle et l’œdème maculaire a pu être démontrée (figures 1A et 1B). L’analyse de l’angiographie à la fluorescéine peut être rendue difficile par l’importance de l’hémorragie associée qui, après sa résorption, peut renseigner sur l’état circulatoire de la rétine.

À la phase aiguë de l’OBVR
Le retard de remplissage veineux s’accompagne souvent d’un retard artériel modéré. La gêne à la circulation de retour entraîne une dilatation veineuse et un ralentissement du flux sanguin, un retard de perfusion du territoire occlus, des microanévrysmes, une dilatation capillaire et un œdème rétinien. Une hyperfluorescence des parois vasculaires avec un phénomène de diffusion plus ou moins intense peut être visible en périphérie rétinienne et évoque une souffrance hypoxique de la rétine au stade aigu, alors que les territoires de non-perfusion ne sont pas encore visibles. L’ischémie rétinienne peut intéresser la périphérie mais aussi la macula, avec rupture de l’arcade et élargissement plus ou moins grand de la zone avasculaire centrale (ZAC). C’est la maculopathie ischémique, de pronostic sévère, atteignant préférentiellement les patients âgés et hypertendus. La rupture de l’arcade anastomotique périfovéolaire est particulièrement bien identifiable à l’examen angiographique, avec un champ compris entre 30 et 60°.

Aux temps tardifs, une imprégnation de la paroi des gros troncs veineux du pôle postérieur est souvent visible, sans phénomène de diffusion (figure 2). Cette coloration des parois veineuses témoigne de la souffrance pariétale secondaire à la distension des vaisseaux et se distingue d’une vascularite par son aspect global, homogène et non segmentaire. La capillaropathie peut être œdémateuse, avec diffusion de colorant à travers le lit capillaire rétinien et des veinules dilatées (figure 3), ou ischémique par la présence de territoires, plus ou moins étendus, de non-perfusion du lit capillaire.

Enfin, l’angiographie montre que l’un des 2 mécanismes, œdème ou ischémie, peut être prédominant, mais qu’ils sont presque toujours associés et intriqués et se modifient au cours de l’évolution et sous l’effet des traitements.

À la phase chronique de l’OBVR

À la phase chronique, de gros microanévrysmes peuvent se développer sur les bordures de non-perfusion capillaire ou sur les anastomoses veinoveineuses dans le territoire de la branche veineuse occluse (figure 3). Ces gros microanévrysmes sont responsables d’une exsudation chronique qui se traduit souvent par des couronnes d’exsudats circinés. Une circulation collatérale ou de suppléance plus ou moins efficace se met en place progressivement, entraînant une dilatation de certains rameaux capillaires de pontage ou de shunts veinoveineux. La collatéralisation veineuse est très spécifique, voire pathognomonique de l’occlusion veineuse rétinienne (figure 4A). Dans les OBVR, ces anastomoses « haut–bas » sont bien visibles sur le raphé horizontal et de part et d’autre du site de l’occlusion où des vaisseaux de pontage peuvent apparaître (figure 4B) [1]. Après plusieurs mois, la macula peut être le siège de remaniements accentués de l’épithélium pigmentaire, sous la forme d’une plage centrale hyperfluorescente, par effet fenêtre, sans diffusion, avec parfois quelques amas de pigment.

Tomographie en cohérence optique

La tomographie en cohérence optique (OCT) est devenue un examen incontournable dans le diagnostic, la description, la quantification et le suivi de l’œdème maculaire des OBVR. Cette technique d’examen non invasive permet d’apprécier les différentes microstructures tissulaires de la rétine et la couche de Henlé dont l’épaississement électif est pathognomonique du stade précoce de l’OBVR. Sur le long terme, l’OCT aide à détecter des lésions qui peuvent influencer le pronostic visuel telles que l’altération de la zone ellipsoïde, le remaniement de l’épithélium pigmentaire, l’atrophie rétinienne (figure 5). L’interface vitréo-rétinienne doit toujours être analysée, à la recherche de tractions vitréo-rétiniennes ou d’une membrane épimaculaire fréquemment observée au cours de l’évolution des OBVR.
L’œdème maculaire cystoïde (OMC) est caractérisé par un épaississement rétinien dans lequel s’accumulent des espaces arrondis optiquement vides (logettes ou pseudo-kystes), à contenu liquidien, hyporéflectifs en OCT. Les logettes cystoïdes prédominent dans la région fovéale où elles peuvent d’emblée être de grosse taille, séparées par les piliers des cellules de Müller (figure 5) [2]. Les mesures automatiques de l’épaisseur rétinienne sont plus précises avec l’utilisation des SD-OCT. Elles permettent d’avoir une évaluation quantitative de l’épaisseur maculaire particulièrement utile pour le suivi et l’évolution sous traitement des OBVR.
Le décollement séreux rétinien (DSR) apparaît comme un espace hyporéflectif rétrofovéolaire, situé entre la rétine neurosensorielle et l’épithélium pigmenté (figure 4C).

Les hémorragies rétiniennes sont visibles comme des zones hyperréflectives.
Des exsudats lipidiques sont visibles comme de petites zones hyperréflectives à contours nets, prédominant dans les couches externes de la rétine.
Les nodules cotonneux apparaissent comme des zones très hyperréflectives au niveau de la rétine interne qui est épaissie.
Les microanévrysmes peuvent parfois être visibles sous la forme de petites lésions arrondies hyperréflectives à contenu hyporéflectif au sein de l’œdème rétinien (figure 5).
De petits points hyperréflectifs (figure 5), qui correspondent à des cellules inflammatoires – microgliales et macrophages – activées par l’inflammation liée à la rupture de la barrière hématorétinienne, sont souvent visibles grâce aux SD-OCT. Ils peuvent être présents dès la phase aiguë de l’OBVR. Ils sont très fins, adjacents aux espaces cystoïdes et à l’accumulation du fluide, mais peuvent être aussi disséminés dans toutes les couches de la rétine, atteignant aussi les couches internes. Ces petits points hyperréflectifs disparaissent après le traitement de l’œdème maculaire. Leur réapparition précoce traduit le début de la récidive.

Angiographie par tomographie en cohérence optique

L’angiographie par tomographie en cohérence optique (OCT-A) fournit des images non invasives des capillaires et des réseaux vasculaires rétiniens sans injection de colorant. Elle se fonde sur la décorrélation d’amplitude à spectre divisé qui permet d’analyser les caractéristiques de la microvascularisation fovéale en fournissant des détails vasculaires stratigraphiques qui n’ont pas été précédemment observés par l’angiographie à la fluorescéine standard. Les filets vasculaires rétiniens normaux et les zones de non-perfusion et de congestion peuvent être identifiés à différents niveaux rétiniens avec un détail des anomalies microvasculaires (figure 6). En effet, la possibilité d’étudier le tissu rétinien par une analyse stratigraphique à l’OCT-A permet de choisir la couche vasculaire à observer. De plus, les caractéristiques de l’OBVR telles que les collatérales veineuses et la gaine vasculaire sont mieux représentées par l’OCT-A (figure 4B). Comme décrit récemment par Maria Cristina Savastano et al. [3] et Yanping Huang et al. [4], la raison d’évaluer séparément les réseaux superficiels et profonds est l’implication différente des 2 couches dans certaines pathologies.

Dans le réseau superficiel et profond de l’OBVR, on note une diminution de la densité capillaire avec un élargissement de la zone avasculaire centrale (figure 1C), une non-perfusion capillaire et l’apparition d’anomalies microvasculaires. Selon Akihiro Ishibazawa et al. [5] et Laura Kuehlewein et al. [6], la zone non perfusée est bien définie par l’OCT-A (figures 6 et 7B). La détection de zones de non-perfusion pourrait être due à un flux sanguin très lent dans ces zones de souffrance, inférieur à la limite de détection de 0,3 mm/seconde sur OCT-A. Les shunts ou anastomoses anormaux qui se sont développés au bord des zones de non-perfusion pourraient avoir un flux sanguin plus rapide permettant d’améliorer leur détection par OCT-A. La congestion vasculaire à la frontière entre la rétine saine et non perfusée siège surtout au niveau du réseau profond (figure 6).

Références bibliographiques
[1] Jaulim A, Ahmed B, Khanam T, Chatziralli IP. Branch retinal vein occlusion: epidemiology, pathogenesis, risk factors, clinical features, diagnosis, and complications. An update of the literature. Retina. 2013;33(5):901-10.
[2] Yamaike N, Tsujikawa A, Ota M et al. Three-dimensional imaging of cystoid macular edema in retinal vein occlusion. Ophthalmology. 2008;115(2):355-62.
[3] Savastano MC, Lumbroso B, Rispoli M. In vivo characterization of retinal vascularization morphology using optical coherence tomography angiography. Retina. 2015;35(11):2196-203.
[4] Y Huang, Zhang Q, Thorell MR et al. Swept-source OCT angiography of the retinal vasculature using intensity differentiation-based optical microangiography algorithms. Ophthalmic Surg Lasers Imaging Retina. 2014;45(5):382-9.
[5] Ishibazawa A, Nagaoka T, Takahashi A et al. Optical coherence tomography angiography in diabetic retinopathy: a prospective pilot study. Am J Ophthalmol. 2015;160(1):35-44.
[6] Kuehlewein L, An L, Durbin MK, Sadda SR. Imaging areas of retinal nonperfusion in ischemic branch retinal vein occlusion with swept-source OCT microangiography. Ophthalmic Surg Lasers Imaging Retina. 2015;46(2):249-52.

Auteurs

Les derniers articles sur ce thème

L'accès à la totalité de la page est protégé.

Je m'abonne

Identifiez-vous